L’installation de l’artiste Ada Petranaki* affronte les stéréotypes à travers un sujet délicat mais profondément humain.

L’installation de l’artiste grecque Ada Petranaki titrée « Sans » dans le cadre de l’événement « Platforms Project 2019** » à Athènes a été dédiée aux femmes touchées par le cancer du sein. Un sujet sensible mais profondément humain qui révèle la vraie beauté…

L’installation d’Ada Petranaki

Dans un petit espace moins de deux mètres carrés, le sujet est présenté d’une manière simple, forte et claire à travers peu d’objets et un support audiovisuel. Le spectateur s’approche de l’œuvre, pleinement accessible, et il y prend sa place. La présence physique de l’artiste elle-même, près de son œuvre, lors de notre visite, prête à discuter et à répondre aux éventuelles questions des spectateurs, rend l’expérience encore plus singulière. Par ailleurs l’artiste restera toujours présente à travers son message auditif à l’intérieur de l’installation.

À l’intérieur de l’installation

Dans cet espace sombre, avec sa voix dans l’oreille, nous nous trouvons à la même hauteur d’une série de têtes nues féminines qui au fond aboutissent d’une image- vidéo. Nous venons en quelque sorte en contact avec l’angoisse existentielle d’une femme malade. Mais ce contact instantané « intime », tant avec les têtes féminines qu’avec la voix de l’artiste, est un basculement révélateur, une prise de conscience sur une autre situation, parfois encore plus dangereuse que la maladie elle-même dont nous n’apercevons pas l’ampleur : les stéréotypes, comme nous l’ indique l’artiste. Les modèles de beauté, trompeurs, fonctionnent souvent comme un piège pour les femmes, en les conduisant à de faux choix… Parfois au prix de leur vie. Une femme malade pourrait même refuser le traitement de chimiothérapie de peur de perdre ses cheveux, symbole de sa « beauté » et par conséquent de sa féminité. Ces inquiétudes résultent d’une société qui exige une apparence sur des normes spécifiques en laissant peu de place à la différence. Une société au regard étroit, superficielle, en quête d’une beauté « prédéfinie » et qui a peur de tout ce qui est différence.

Ada Petranaki


L’œuvre d’Ada Petranaki malgré une possible angoisse qui s’en dégagerait, liée à la maladie, finit par être libératrice et ouvre la voie pour une résistance générale aux stéréotypes de tout genre. L’acceptation de la différence et la réconciliation commence par un chemin intérieur, et l’œuvre nous offre généreusement une sensation d’intimité et de familiarité : une recherche intérieure essentielle. Le corps n’est que le porteur de notre vie, c’est elle qui a le plus de valeur, c’est elle qui l’embellit par tous les moyens. L’installation d’Ada Petranaki libère ces moyens, parfois d’une manière inattendue, et nous ouvre les perspectives de l’acceptation de soi et de la libération.
L’art d’Ada Petranaki nous procure une riche expérience en combinant parfaitement la création avec une matière à réflexion, d’une manière simple mais sincère qui sait s’approcher de notre âme.

*Ada Petranaki est diplômée de l’École des Beaux-arts d’Athènes depuis 2015 ainsi que du Master du département des Arts Plastiques depuis 2018. Elle concentre son travail surtout sur l’exploration de la pensée philosophique et des archives. Le caractéristique principale de son travail est le mélange des sensations auditives et olfactives au sein des installations plurisensorielles, l’expression des questionnements profonds et la recherche identitaire. Elle a réalisé 5 expositions personnelles et a déjà participé à plus de 30 expositions collectives en Grèce et à l’étranger. Site de l’artiste : https://alexandrapetranaki.wixsite.com

**Platforms Project est un événement annuel en Grèce inauguré en 2013. Son but principal est de mettre en avant la scène artistique indépendante à travers des initiatives collectives en Grèce et à l’étranger. Pour plus d’informations : https://platformsproject.com/

Evangelia Tzimourta | Artvingtdeux.fr